Henri Konan Bédié n’a pas donné dans la langue de bois dans le dernier entretien qu’il vient d’accorder au confrère Jeune Afrique, dans sa dernière édition disponible depuis ce dimanche 22 septembre 2019, sur le marché.
Direct et parfois incisif, le président du Pdci-Rda a fait un tour d’horizon de l’actualité politique ivoirienne y compris la sienne. L’ancien chef de l’Etat, qui n’occulte pas la possibilité qu’il candidate à l’élection présidentielle de 2020, a situé l’opinion sur son rapprochement actuel avec Laurent Gbagbo, l’ex-président vivant en résidence sous condition à Bruxelles.
Au sujet de la plateforme qu’il entrevoit avec son ancien opposant, Henri Konan Bédié croit fermement à ce projet et en rassure ses partisans. « Ce que nous avons décidé à Bruxelles tient toujours. Le Pdci et le Fpi travaillent désormais ensemble au sein d’une même plateforme politique ».
Le président du Pdci-Rda réplique à ses pourfendeurs et à ceux qui pronostiquent sur un échec du rapprochement entre le Fpi et son parti. « Ils sont socialistes et nous sommes libéraux, notre plateforme n’est donc ni idéologique ni rigide. C’est une entente pour travailler ensemble à des objectifs précis en vue de l’élection présidentielle de 2020 ».
Réponse à Ouattara
A propos de cette entente, le ‘’Sphinx’’ de Daoukro pense que le président de la République, Alassane Ouattara se trompe dans ses certitudes.
De quoi à l’exposer à des déconvenues.
« Il a des certitudes comme cela, il s’imagine savoir ce que pensent les gens. Alors souvent, quand il comprend qu’il s’est trompé, le réveil est brutal », prévient Konan Bédié interrogé sur les propos du chef de l’Etat, qui laissait entrevoir dans un entretien accordé le 06 août dernier à la télévision ivoirienne des ressentiments entre les nouveaux alliés en idylle : « Je sais ce que Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié pensent l’un de l’autre ».
Qui de la place de Guillaume Soro dans la plateforme en préparation ?
« J’ai de très bonnes relations avec Guillaume, nous avons la même vision, et les mouvements qui le soutiennent font partie de notre alliance », clarifie l’ancien président du présidium du Rassemblement des Houphouëtistes devenue le parti unifié au pouvoir sous les auspices du président Ouattara.
Moi candidat en 2020, oui; mais pas Ouattara!
S’agissant du contenu de la plateforme qu’il entrevoit avec ses nouveaux alliés, Henri Konan Bédié fait aussi cette précision.
« Chaque parti aura son candidat. Mais au second tour, le mieux placé recevra le soutien de l’autre ».
Un projet qui exclut toute idée d’une candidature unique au sein de l’opposition.
Ce qui est certain, pour le président du Pdci-Rda, c’est déjà acté, son parti aura un candidat en 2020.
Mais, ce candidat ne sera pas connu avant le dernier semestre de 2020.
Echéance à laquelle son parti ira en convention pour opérer son choix.
Aurait-il l’ambition de se porter candidat, lui-même, à ces échéances de 2020 ?
Le ‘’Sphinx’’ de Daoukro n’exclut pas cette possibilité.
« Vous le saurez au deuxième semestre de 2020, lorsque la convention d’investiture désignera le candidat du Pdci.
Par le passé, j’ai été président de la République, mais jamais je n’ai été candidat.
On est toujours venu me chercher. (…)
Si le parti vient me chercher, alors je verrai dans quel état physique et personnel je serai », lâche l’héritier au pouvoir de feu Félix Houphouët-Boigny pour qui redevenir président ne serait que justice à lui rendue.
« Oui, ce serait une revanche, mais il n’y aurait pas de vengeance.
Ce serait me rendre justice. (…) Ce serait également un facteur de réconciliation ».
Tripatouillage.
Alors qu’il nourrit cette ambition de réhabilitation après le coup d’Etat de 1999 dont il a été victime, ainsi que ses 500.000 voix dont il dit avoir été spolié en 2010 pour faire de lui l’adversaire de Laurent Gbagbo au second tour, le président Bédié écarte toute possibilité de candidature de son ancien et à niveau rival, Alassane Ouattara. « Contrairement à moi il n’a pas le droit de se présenter. (…) S’il fait un tripatouillage, peut-être, mais pas en l’état. La limite, c’est deux mandats, c’est écrit dans la Constitution. Un troisième mandat ne serait pas acceptable, ni pour moi ni pour le pays.
S’il le fait, vous entendrez le tapage que cela fera », prévient l’ex-allié du chef de l’Etat.
Qui craint un « tripatouillage » de la Constitution, notamment en ce qui concerne les bruits relatifs à un probable retour de la limite d’âge dont il pourrait être une victime.
« Si j’étais lui, je ne ferais pas cela. La manœuvre serait trop flagrante », estime Henri Konan Bédié, qui dira plus loin, en ce qui concerne ses ambitions à 85 ans : « Il n’y a pas d’âge limite en politique. Tant que je suis en bonne santé, tant que le PDCI a besoin de moi, je dois le servir. Je ne cours pas après l’argent, je ne cours pas après les honneurs : je le fais par mission, comme un sacerdoce ».
Une option, qui précise de plus en plus sa volonté de requérir un dernier mandat à ses partisans et aux Ivoiriens.
F.D.BONY